Sur la commune d'Asques, au lieu-dit Couffins, la ferme de Guillaume Vandenberghe se niche dans un méandre de la Dordogne, comme dans un berceau. De la RD 737, un chemin longe des parcelles de terres cultivées et mène à son exploitation, sa passion, sa maison.
« Attention, on est en zone rouge ! » s’exclame Guillaume en souriant.
Jusqu'ici, les digues sur la Dordogne qui protègent son exploitation, jouent leur rôle. En 1956, le propriétaire du Château Couffins n'a pas eu la même chance, quand la gelée a fait exploser les ceps de sa propriété viticole. C'est en 1957 que le grand-père de Guillaume, fraîchement débarqué de sa Normandie natale, rachètera le domaine, arrachera les pieds de vigne morts pour planter des céréales et fera paître quelques vaches laitières. La ferme était née ! Reprise ensuite par son fils et depuis 2006, par son petit-fils, Guillaume : l'EARL Vandenberghe, de père en fils.
Pour l'amour des animaux
Guillaume n'était pas destiné à reprendre la ferme, mais sa passion pour les animaux aura été plus forte que sa prépa en biologie : il change de voie et passe alors un diplôme agricole pour pouvoir s’installer et être aidé au démarrage. Il effectuera son premier stage au Groupement des éleveurs girondins (GEG), société coopérative agricole.
« C’est là que j’ai rencontré Georges Supiot, puis Francis Tréjaut, éleveurs. Tous les deux m’ont soutenu, ont cru en moi et m’ont transmis le goût de la génétique et de la reproduction chez les bovins », confie Guillaume, devenu sélectionneur et juge international de concours.
Gérant de l’EARL, puis administrateur du GEG, il étendra au fur et à mesure l’exploitation familiale à 180 ha et le cheptel à 220 animaux dont 80 vaches mères en race Limousine. Naisseur, éleveur et engraisseur, il accompagne ses bêtes jusqu’à l’abattoir du GEG à Bègles et vend dans les cinq boucheries de la coopérative réparties en Gironde, ou parfois en direct. Le virage est pris. Guillaume maîtrise son exploitation céréalière et bovine du début jusqu’à la fin, dans un cercle vertueux.
Un cercle vertueux et fragile
L’exploitation est autonome : autonomie alimentaire avec l’herbe et le maïs qui sèche naturellement dans des cribs, et protéique avec la luzerne et le soja pour engraisser les bêtes qui elles-mêmes produisent de la matière organique. Le fumier est composté pour nourrir les terres. Même l’électricité sera bientôt produite sur place grâce aux panneaux photovoltaïques qui couvrent les bâtiments.
« Je pratique une agriculture raisonnée et plus que raisonnable », sourit Guillaume. Mes vaches sont à l’herbe 260 jours par an sur 70 ha de pâturages tournant dynamique (PTD). Elles entretiennent ce territoire ouvert à la diversité. Il en résulte moins d’engrais, moins de carburant car moins de mécanisation, et plus de bocages et d’ombres pour les bêtes grâce aux haies plantées depuis deux ans et subventionnées par le Département. On capte ainsi plus de carbone et on compense aujourd’hui nos émissions à hauteur de 80%. Nous nourrissons les habitants en respectant l’environnement et la nature et nous atteindrons la neutralité carbone d’ici 5 ans. »
Il s'inquiète aussi :
« Les crises sanitaires - pas que chez l’homme - les cataclysmes climatiques, la crise économique, la rémunération des éleveurs… autant de facteurs qui font craindre la rareté de la production. La moyenne d’âge des éleveurs est de 57 ans ! Comment attirer les jeunes s’il n’y a plus de transmission ou de donation ? Prendre le virage de la transformation, c’est long, mais c’est la seule solution. Et elle passe par le pâturage tournant dynamique ».